Session Cauchemardesque
Quel bonheur, quelle joie d’être allongé dans un bedchair en contact avec dame nature, cette merveille si fragile. Ce joyau du monde si frêle, si puissant, si envoûtant et enivrant, câlin et ravageur émanant un agréable et doux parfum titillant mon odorat .
D’être à l’écoute des gazouillis et des chants mélodieux d’oiseaux qui m’assoupissent en me plongeant dans des rêves remplis d’espoirs d'entendre les détecteurs cracher leurs décibels synonymes d'adrénaline et de souvenirs...
Une église lointaine laisse échapper le tintement des cloches, le vent se lève brusquement et en quelques secondes mon subconscient vérifie si les sécurités ont été prises telles que l’amarrage de la barque, le rangement du matériel afin que rien ne s’envole. Les rafales deviennent plus fréquentes et plus violentes. Je me rassure car je sais que tout est en ordre.
Les feuilles tourbillonnent sur ce lac d’une eau turquoise et le clapotis se transforme doucement en mini vague émoussant les berges qui colorent cette eau limpide. Je prends mon téléphone et vérifie la météo régionale qui ne laisse rien prédire de terriblement alarmant...23h30 Le sommeil endort ma conscience et finit par gagner sur la peur car de ma vie de pêcheur ces bourrasques d’une force incroyable ne m’ont jamais accompagné....
02h15. Soudain le bruit strident de ma centrale me met en effervescence et je me retrouve face à la réalité, je cours sur cette canne dont le moulinet s'évide incroyablement, d'un geste ample et précis, je prends contact avec le poisson qui d'une force époustanflante file droit vers la berge opposée truffée d’obstacles en tout genre.
Impossible de brider, mon coeur bat la chamade. Je transpire malgré les bourrasques, je ne sais que faire, car la meilleure solution pour prendre cette furieuse dont les coups de tête laissent présager peut-être le poisson de ma vie, serait de prendre la barque mais les conditions climatiques tellement incertaines frisent le déraisonnable. Mon esprit fuse, car la belle ne cherche pas à comprendre et continue, malgré la traction opposée que je lui afflige, à filer droit vers les souches qui apparemment ne sont pas secrètes pour elle.
Je prends la décision risquée d’ôter les amarres, je saute dans la barque et actionne le moteur électrique en direction de cette reine des abysses et m’éloigne rapidement du campement car le vent me porte avec rage de son coté. Les vagues sont de plus en plus fortes au fur et à mesure que je gagne le large, la violence du vent assèche les perles de sueur qui me coulaient sur le front et le froid commence à se faire sentir, l’adrénaline m’empêche d'y penser car le contact est toujours très fort.
L'eau passe par dessus bord , les vagues sont énormes et la peur commence à m' envahir, j' essaie de brider et d' abréger le combat tout en essayant de préserver et de ne pas blesser cette carpe ou ce silure car St cassien détient quelques beaux spécimens. Enfin,je me retrouve à l' aplomb de cette torpille les coups de tête sont très prononcés,le vent m'éloigne dangereusement, la nuit noire liée à la couverture nuageuse laisse la place à la panique, mais en même temps le combat me laisse perplexe,j'ai les pieds trempés car l' eau de chaque vague rentre dans la barque,je me vois dans l'obligation de combattre ce poisson et de temps à autres écoper d 'une main afin que le niveau d'eau de la barque ne soit pas trop critique.
35 minutes se sont écoulées, je n’ai plus de repère visuel concernant le campement, j’ai les pieds gelés je maudis le dieu éolien qui détruit le plaisir passionnel de notre hobby. Je sens à la fois peur ,fatigue et détresse tout me passe par la tête car une faiblesse de la batterie commence à se faire sentir. Je suis toujours là, avec ce poisson que je n' ai pas encore aperçu, je ne comprends plus rien ma force diminue et celle du poisson reste identique, soudain le moteur rend l' âme car la batterie me laisse tomber. La rage, la colère même un enfant aurait vérifié son matériel.
J’en pleure le vent me pousse de plus en plus et il me sera impossible de revenir à la rame. Je pense au pire mon esprit se dirige vers ma femme et mes enfants, seul le contact du poisson me ramène à la raison, je sens enfin après tant de labeur que je gagne mètre par mètre du terrain sur le spécimen que tantôt je maudis tantôt je vénère...
Soudain un rush incroyable me fait perdre l’équilibre et je tombe au fin fond de la barque, dans cette panique une rame est passée par dessus bord, j’ hurle, je pestifère,
"" Le diable est avec moi"". Je suis à deux doigts de couper le fil car cet enchaînement est vraiment un mauvais présage. J’allume ma frontale pour percer un peu cette étendue et essaye d'apercevoir la berge d’en face mais je suis là, seul, dans cette immensité, sans aucun repère, avec ce poisson que je commence à maudire de plus en plus.
J’essaie de me calmer, de me concentrer et d’en finir avec ce monstre car je me demande vraiment ce qui au bout de la canne dont le blank craque avec ferveur qui parfois me surprend et m’oblige à régler la micrométrie de mon frein afin que le moulinet compense, le temps fait que l’animal faiblit et doucement,enfin, je sens l’éventuelle conquête. Je retrouve de l’énergie et je mets de coté tous les problèmes, je m’affaire avec toutes les forces qui me restent pour prendre ce poisson trophée. Mètre par mètre, je pompe et un sourire, malgré tout, se fait sentir sur mon visage car j’arrive enfin à la tête de ligne. Des remous énormes à quelques mètres de la barque laisse présager un poisson filiforme et massif.
Je pense à un énorme silure,je ne tiens plus et rallume ma frontale pour découvrir une couleur surprenante,une couleur blanche et une tête énorme,la lumière l’effraie et le fait sonder avec une force sidérante, Mon dieu ,serait-ce un silure albinos.......Mon moulinet s’évide à nouveau à une vitesse fulgurante une première estimation d'environ 2 mètres à 2 mètres cinquante me confirme la forme d’un silure avec cette couleur si surprenante, je continue à pomper et soudain j’ ai l’impression de mouliner dans le vide car le poisson remonte à une vitesse vertigineuse,une vitesse folle vers la surface ,je dirige la lueur de ma frontale vers l’ extrémité de ma canne et à ma grande stupeur je vois une gueule béante énorme hideuse foncer vers moi. Pris de panique, Je crie à pleins poumons et mon hurlement réveille mon esprit….
Soudain plus un bruit, plus de vent, plus de vagues cette gueule béante, cette vision ,ce cri m a extirpé de ce sommeil de plomb et de ce cauchemar que j’espère ne jamais vivre un jour.....
BIIIIIIIIIIIIIPPPPPPPP ……………………
Bien à vous tous….
Claudius…………..
Publié par Claudius le 09-04-2007